Un témoin séculaire au cœur de la Creuse.
Lorsque l’on franchit le pont sur le Thaurion, le regard est immanquablement attiré par la silhouette austère et majestueuse du Château de Pontarion. Proche des rives de la rivière, ce vénérable édifice constitue depuis le XVe siècle un repère historique et affectif pour la commune de Pontarion et ses environs.
Monument de pierres et de mémoire, ce château de famille s’inscrit dans le paysage creusois comme un emblème discret mais essentiel, dont l’histoire, bien que parcellaire, s’inscrit au cœur de celle de la Marche, cette ancienne province à laquelle appartient la Creuse.
Des origines chevaleresques
La construction du Château de Pontarion remonte à la seconde moitié du XVe siècle. L’édifice fut élevé à l’initiative d’Antoine d’Aubusson, frère du célèbre Pierre d’Aubusson, Grand Maître des Chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem, figure légendaire de la défense de Rhodes contre les Ottomans en 1480.
Antoine, capitaine général des gentilshommes de la Marche et du Limousin lors du siège de Rhodes, aurait rapporté de ses campagnes ce goût pour l’architecture défensive. Le château, alors implanté sur les abords d’un gué stratégique du Thaurion, devait initialement comporter sept tours, dont seules subsistent aujourd’hui des traces dans la structure du corps principal et un bâtiment annexe longeant l’actuelle D941.
Un château sauvé de l’abandon au XXe siècle
À la veille du XXe siècle, l’édifice était qualifié de « reste de Château » dans les archives locales. Il fallut attendre 1936 pour qu’un homme de passion et de conviction, André Roussel Le Roy, en fasse l’acquisition et entreprenne, à ses frais, de vastes travaux de consolidation et de restauration.
De nombreuses interventions furent menées dès cette époque :
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Deux des anciennes tours furent partiellement remontées.
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Des remises en état essentielles furent réalisées sur des structures fragilisées.
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À la place d’un bâtiment effondré visible sur des cartes postales de 1907, un mur d’enceinte crénelé fut érigé.
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À l’intérieur, les planchers furent renforcés, des corbeaux en béton ajoutés et plusieurs cheminées restituées, dont deux arborent la Croix de Malte, accordée par l’Ordre en hommage à la mémoire d’Antoine d’Aubusson.
En 1941, le château fut officiellement inscrit à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques (ISMH).
<— Dessin à la plume par Auguste Clergeau
Une histoire de transmission familiale
Au décès d’André Roussel Le Roy en 1973, sa nièce, Suzanne Darricau, hérita de la demeure. Elle assura, avec constance et modestie, l’entretien et la sauvegarde du domaine, épaulée par les services de l’Architecte des Bâtiments de France de Guéret.
De 1973 à 1994, les interventions furent nombreuses :
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Réfection de toitures et de murs d’enceinte
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Restauration de crépis et consolidation des pignons
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Élagage et abattage raisonné des arbres centenaires
En 1994, à la disparition de Suzanne Darricau, son fils reprit à son tour le flambeau et engagea d’importants travaux de sécurisation et d’entretien. Le Château de Pontarion semblait alors sauvé et prêt pour le XXIe siècle.
Le drame de 2023 : une tornade meurtrière
Le 9 mars 2023, en milieu d’après-midi, une tornade d’une intensité rare (force EF2, vents estimés à 175–220 km/h) frappa le village de Pontarion. Le Château fut sévèrement touché :
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Arbres séculaires déracinés tant côté nord qu’au bord du Thaurion.
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Toitures arrachées, charpente endommagée, tuiles propulsées à des dizaines de mètres.
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Vitres récentes brisées, des tuiles s’étant même fichées dans le paratonnerre.
Rapidement alertés, la commune, les pompiers et l’entreprise Nicon se mobilisèrent pour poser en urgence un bâchage précaire, suivi, en juin, d’une mise hors d’eau plus pérenne, coordonnée avec la DRAC Limoges et l’UDAP Guéret.
Un patrimoine à préserver : état des lieux et perspectives
En 2024, sous la direction de l’Agence DLAA.ARCHI et de Christophe Gillet, Architecte du Patrimoine, un relevé architectural exhaustif a été mené :
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Relevé bâtimentaire complet, modélisation 3D des charpentes et des combles.
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Orthophotographies extérieures et drone
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Diagnostic patrimonial précis des charpentes XVᵉ, d’une qualité et d’une authenticité remarquables.
Ce travail s’est accompagné d’une expertise croisée avec l’entreprise Roussy-Avignon, spécialisée en restauration patrimoniale.
Les conclusions sont sans appel : la charpente d’origine, bien qu’admirablement conservée pour son âge, a subi de graves dommages structurels. Les travaux projetés excèdent 500 000 € et nécessitent un plan de financement associant aides publiques, mécénats privés et participations citoyennes.
Vers une renaissance partagée
Par-delà les pierres et les toitures, le Château de Pontarion incarne l’histoire d’un territoire, la fidélité d’une famille et la mémoire collective d’un village. Sa sauvegarde est aujourd’hui l’affaire de tous ceux qui, sensibles au prestige des choses anciennes et à la transmission du patrimoine, souhaitent contribuer à son avenir.
Un appel au mécénat est en préparation via La Demeure Historique, avec le soutien affiché de la Mairie de Pontarion et de nombreux partenaires locaux.
« Le patrimoine ne se possède pas :
il se reçoit, se protège et se transmet. »
